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Stalker

4 817 octets ajoutés, 23 décembre 2012 à 19:09
Retour au ''' <span id="ancre_48b">Plan</span> 48 :''' Le Professeur discute avec l'Écrivain, toujours à propos du [[météorite]]. «<br/>- L'Écrivain : « ''Mais vous, qu'en pensez-vous ?''<br/>
- Le Professeur : ''Je ne pense rien. Tout ce qu'on veut Un message à l'humanité, comme dit un collègue ou un cadeau''.<br/>
- L'Écrivain : ''Un drôle de cadeau ! Pourquoi l'auraient-ils fait ? »<br/>
<span id="ancre_52p"> </span>
[[Fichier: Stalker_Tarkovski_Plan_52_Zone_a_Bus.jpg|300px|thumb|right| alt=''Stalker'', '''Photogramme - 32''' : '''Plan 52.''' Le petit bus envahit d’herbes. |''Stalker'', '''Photogramme - 32''' : '''Plan 52.''' Le petit bus envahit d’herbes. ]]
 
- Le Professeur : '' Vous êtes un insensé. '' <br/>
- L’Écrivain : '' Vous pouvez parler… '' (Il porte la bouteille à ses lèvres. Le Stalker la lui prend comme s’il voulait en boire aussi.) <br/>
- Stalker : '' Vous permettez ? '' »(Cf. '''Photogramme – 38.''') (Il s’éloigne d’eux, il sort du cadre, les deux hommes l’observent. On entend le bruit que fait le liquide en atteignant le sol. L’Écrivain fronce les sourcils.
'''<span id="ancre_58">Plan</span> 58''' : ''54' 40"'' : Le Stalker est debout près d’une dalle de pierre émergeant des herbes, en train de verser le contenu de la bouteille : «'' Vous sentez… L’herbe… '' » (3ème allusion à l’odeur des plantes.) (Cf. '''Photogramme – 39.''')
'''<span id="ancre_62">Plan</span> 62''' : ''57' 41"'' : Le Professeur et le Stalker observent l’Ecrivain :
- Stalker : « '' Pourquoi vous… '' <br/>
- Le Professeur : '' Quoi, « pourquoi ? » '' <br/>
- Stalker : '' Pourquoi l’avez-vous arrêté ? '' <br/>
- Le Professeur : ''Moi ? Je pensais que c’était vous… '' <br/> »
'''<span id="ancre_63">Plans</span> 63 - 65''' : L’Ecrivain se retourne vers les deux autres, et puis revient vers eux. Il s’approche d’eux. Nous entendons le son de sa respiration, il a eu vraisemblablement peur : « ''Mais pourquoi m’avez-vous dit d’arrêter ? '' (Plan 65) <br/>
- Stalker : '' Ça suffit, je vous dis… La Zone est un système très compliqué. Il y a plein de pièges, qui sont tous mortels. J’ignore ce qui s’y passe en l’absence des hommes, mais dès qu’ils apparaissent tout se met en mouvement… Des pièges disparaissent, d’autres les remplacent. Des endroits qui étaient sûrs deviennent infranchissables. La route devient simple et facile… ou bien semée d’embûches. C’est ça la Zone… On pourrait la croire capricieuse, mais à chaque instant… elle est telle que nous l’avons faite… par notre propre état d’esprit… Il y a même eu des cas où… les gens rebroussaient chemin à mi-parcourts… D’autres mourraient au seuil même de la chambre. Tout ce qui se passe ici dépend non de la Zone, mais de nous. '' <br/>
- Le Professeur : (Off) '' Elle laisse passer les bons et tue les méchants ! '' <br/>
- Stalker : '' Je ne sais pas. Je crois qu’elle laisse passer ceux… qui n’ont plus aucun espoir… Ni les bons, ni les mauvais… Les malheureux. Mais le plus malheureux périra vite s’il ne sait pas se conduire… Vous avez de la chance qu’elle vous ait prévenu. '' <br/>»
<center>* </center>
- Stalker : (off) ''Retournons tous ensemble. Je vous rendrai votre argent. J’en déduirais une partie pour… le dérangement… '' <br/>
- L’Écrivain : '' Vous voilà dégrisé, Professeur ? '' <br/>
- Le Professeur (se lève, remet son sac à dos) : ''C’est bon, jetez votre écrou. '' <br/>»
<center>* * *</center>
'''<span id="ancre_67">Plan</span> 66''' : ''1h 02' 26"'' : Le Professeur et l’Écrivain sont près d’une partie de la bâtisse à moitié en ruine. Le Professeur est assis sur un petit muret, et masse ses pieds. L’Écrivain est allongé, la tête reposant sur une grosse pierre. Derrière eux, un sombre et mince passage vers l’intérieur de la bâtisse. Au-dessus du Professeur, pend une bandelette blanche.
- Stalker : « '' Vous êtes fatigués ou quoi ? '' (Cf. '''Photogramme – 42.''')<br/>- L’Écrivain : ''Mon Dieu ! A en juger par son ton, il va encore nous faire de la morale. '' »<br/>
A cet instant précis, nous entendons en off, le bruit d’une pierre jetée dans l’eau.
=====Le Professeur perd son sac =====
'''<span id="ancre_69c">Plan</span> 69c''' : ''1h 04' 45"'' : Le Professeur est étonné : « ''Nous avançons déjà ? » <br/>
- Stalker : '' Bien sûr. Pourquoi ? '' <br/>
- Le Professeur : '' Attendez ! Je pensais que… vous vouliez nous montrer quelque chose. Et mon sac à dos ? '' <br/>
- Le Professeur : '' C’est encore loin cette chambre ? '' <br/>
- Stalker : '' Si on marchait en ligne droite… à deux cents mètres. « Si »… voilà le malheur. '' <br/>
- L’Écrivain : '' Laissez là votre empirisme rampant, Professeur, les miracles sont en dehors de l’empirisme. '' »
<center>* </center>
'''<span id="ancre_70">Plans</span> 70 - 72''' : ''1h 06' 40"'' : On découvre sous les brèches d’un mur une large et puissante chute d’eau. Au premier plan, des vieilles lampes en fer sont suspendues à intervalles presque réguliers. Gros plan de l’Écrivain qui regarde avec inquiétude l’environnement. Il rejoint le Stalker.
- Stalker : « '' Et voilà le tunnel sec.'' <br/>
- L’Écrivain : '' Vous appelez ça sec ? '' <br/>
- Stalker : '' Plaisanterie locale. D’habitude, il faut nager. '' »
L'Écrivain sent que le Professeur défaille, puisqu'il demande au Stalker : (dans un endroit de la Zone où ils ont de…l'eau jusqu'aux chevilles.) : « ''Mais où est le Professeur. (…) (il) a disparu.'' » (Plan 72.) (Cf. '''Photogramme – 46.''') <br/>
- Stalker : '' Professeur, ohé ! Mais il marchait derrière vous, voyons ! '' <br/>
- L’Écrivain : '' Il a dû décrocher et il s’est perdu. '' <br/>
- Stalker : '' Mais non, il a dû aller chercher son sac. Il ne pourra pas s’en sortir. '' <br/>
- L’Écrivain : ''Et si on l’attendait ? '' <br/>
- Stalker : '' Non, pas ici, où tout change à chaque instant. '' »
<center>* </center>
'''<span id="ancre_73">Plan</span> 73''' : ''1h 09' 25"'' : Gros plan d’un tison de braises posées sur des rochers. Le vent fait rougir les braises. (Cf. '''Photogramme – 47.''')
- L’Écrivain : (off) « '' Regardez, qu’est-ce que c’est ? '' <br/>
- Stalker : (off) ''Je vous l’ai pourtant expliqué. '' <br/>
- L’Écrivain : (off)'' « Expliqué » ? '' <br/>
- Stalker : (off)'' C’est la Zone, comprenez-vous, la Zone ! … Vite, venez vite ! '' »
Le travelling passe au-dessus d’un étroit cours d’eau clair passant entre des pierres. L’eau recouvre un sol carrelé. On aperçoit divers objets : une seringue en métal, une passoire rectangulaire, des barres métalliques, une mitrailleuse, des pages imprimés.
On s’aperçoit qu’ils sont de retour au même lieu où ils s’étaient arrêtés une première fois. ( [[#ancre_67|Plan 67]]) Le Professeur est en train de se restaurer.
- Le Professeur : « ''Je vous suis très reconnaissant d’avoir… '' <br/>
- Stalker : '' Comment êtes-vous arrivé ? '' <br/>
- Le Professeur : '' Une grande partie du chemin… Je l’ai faite à quatre pattes. '' <br/>
- Stalker : '' Et comment nous avez-vous devancés ? '' <br/>
- Le Professeur : ''Devancés moi ? Je suis revenu chercher mon sac à dos. ''»
Tout à coup, l’Ecrivain lève la tête, il s’aperçoit qu’il y a un écrou suspendu : « Notre écrou, que fait-il ? <br/>
- L’Écrivain : '' Qu’y-a-t-il de particulier à comprendre ? Les lois de Newton… '' ('''<span id="ancre_75">Plan</span> 75''' : ''1h 12' 25"'' : L’Écrivain est couché à plat ventre.) ''Quelle affaire ! Des abîmes psychologieuses. A l’institut, on est mal vu. Pas de fonds pour les expéditions… Alors on bourre son sac de manomètres-merdomètres… On pénètre illégalement dans la Zone, et on analyse les miracles de ce lieu… '' ('''<span id="ancre_76">Plan</span> 76''' : ''1h 12' 45"'' : Le Professeur repose sur une pente, il a les genoux recroquevillés.) '' Personne au monde ne connaît l’existence de la Zone. Alors, c’est sensationnel ! La télévision, les admiratrices qui en bavent… qui vous tressent des couronnes laurier… '' ('''<span id="ancre_77">Plan</span> 77''' : ''1h 13' 01"'' : Le Stalker, agenouillé d’abord, s’étend à plat ventre.)'' Apparaît le Professeur, tout de blanc vêtu, qui annonce : « Manel, thecel, pharès ».<ref> La révélation faite au prophète Daniel. Dans le ''Livre de Daniel'', Balthazar, le dernier roi de Babylone, assiégé par Cyrus dans sa capitale, se livre à une orgie avec ses courtisans ; par une forfanterie d'impiété, il fait servir sur les tables les vases sacrés que Nabuchodonosor avait autrefois enlevés au temple de Jérusalem. Cette profanation à peine commise, le monarque voit avec épouvante une main qui trace sur la muraille, en traits de flamme, ces mots mystérieux : «''Mane, Thecel, Phares'' » («''Mené, Teqel et Parsîn''» en hébreux soit « '''compté, pesé, divisé''' ») que le prophète Daniel, consulté, interprète ainsi : «'' Tes jours sont comptés ; tu as été trouvé trop léger dans la balance ; ton royaume sera partagé'' ». Dans la même nuit, en effet, la ville est prise. Balthazar est mis à mort et la Babylonie partagée entre les Perses et les Mèdes. (Source : www.akadem.org)</ref> Les gens sont sidérés… '' ('''<span id="ancre_78">Plan</span> 78''' : Le Professeur a toujours les genoux recroquevillés, et la tête posée sur son sac. ) (Cf. '''Photogramme – 49.''')'' et hurlent en chœur : « Donnez-lui le prix Nobel ». ''<br/>
- Le Professeur : '' Minable scribouillard ! Psychologue à la noix ! Écrivez donc sur les murs des chiottes… pauvre débile !'' <br/>
- L’Écrivain : '' C’est pas très fort, vous n’êtes pas à la hauteur. '' » <br/>
- Stalker : ''Moi non plus. Ils sortent de la Chambre, je les reconduis et on se revoit plus jamais. Les désirs ne se réalisent pas immédiatement. '' <br/>
- L’Écrivain : (off)'' Et vous, cette « chambrette » ne vous a jamais… tenté personnellement ? '' <br/>
- Stalker : '' Je suis bien comme je suis. '' <br/>- L’Écrivain : '' '' <br/> - Stalker : '' '' »<br/>
'''<span id="ancre_83">Plan</span> 83''' : ''1h 15' 29"'' : Le Stalker est allongé sur le côté. Autour de lui, de l’eau. Le chien noir s’approche de lui, et vient se coucher contre lui. (Cf. '''Photogramme – 51.''')
- Le Professeur : (off)''Soyez gentil, laissez-moi tranquille. Laissez-moi m’assoupir, je n’ai pas dormi de la nuit. Gardez vos complexes pour vous. '' <br/>
- L’Écrivain : ''De toute façon toute votre technologie… ces hauts fourneaux et toutes ces roues… et tout ce remue-ménage… en vue de moins travailler et bouffer davantage – ne sont que béquilles et prothèses. L’humanité existe pour créer. Créer des œuvres d’art. ''(Cf. '''Photogramme – 52.''') ''Et ça ne lui rapporte rien, à l’opposé des autres actions humaines. Les grandes illusions ! Images de la vérité absolue. Vous m’écoutez, Professeur ? '' <br/>
- Le Professeur : (off) ''Qui parle d’être désintéressé à l’époque où les gens… meurent encore de faim ? Vous tombez de la lune ou quoi ? '' »
'''<span id="ancre_86">Plan</span> 86''' : ''1h 18' 46"'' : Le Professeur est allongé sur le côté. Ses yeux sont fermés.<br/>
- L’Écrivain : (off)« '' C’est là, notre aristocratie intellectuelle ? Vous ne savez pas raisonner de façon abstraite. '' <br/>
- Le Professeur : '' Auriez-vous l’intention de… m’apprendre quel est le sens de la vie. Et m’apprendre aussi à réfléchir ?'' <br/>
- L’Écrivain : (off)'' C’est inutile... Bien que Professeur, vous n’êtes pas un esprit éclairé. '' <br/>
- Le Professeur : '' Auriez-vous l’intention de… m’apprendre quel est le sens de la vie. Et m’apprendre aussi à réfléchir ?'' »
'''<span id="ancre_88 ">Plan</span> 88''' : ''1h 19' 55"'' : Le Stalker se repose sur son bras.
- Voix chuchotante : (off) « ''Il y eut alors un violent tremblement de terre. Le soleil devint sombre tel un cilice. Et la lune devint rouge comme le sang. '' ('''<span id="ancre_89">Plan</span> 89''' : ''1h 20' 21"'' ) '' Les étoiles du ciel tombèrent sur la terre comme un figuier secoué par un vent violent… dont les figues, encore vertes, tombent à terre. Et le ciel disparut, comme un parchemin qu’on roule. Les montagnes et les îles s’arrachèrent de leurs places… Les rois de la terre et les grands de ce monde… et les riches et les puissants… '' »
* Travelling avant et zoom en gros plan sur l’eau. Dans l’eau on distingue, une seringue (seconde fois), la terre vaseuse, des morceaux de fer rouillés.
- Voix chuchotante : (off) « '' … les gens forts et les gens libres… se cachèrent dans les cavernes et dans les gorges disant aux montagnes et aux pierres : tombez sur nous et cachez-nous de celui qui siège sur le trône épargnez-nous la colère de l’agneau. ''»
* Travelling (suite) : Des racines, des reflets d’arbres, des morceaux de miroirs… Et dans une espèce de récipient en verre, des petits poissons vivants.
- Voix chuchotante : (off) « '' Car est arrivé le grand jour de Sa colère. Qui donc pourra survivre ? '' »(Rire de la vois off en écho.)
* Travelling (suite) : Sous les pierres, une seringue (3ème fois), une cuillère, un récipient en fer blanc à l’intérieur duquel il y a une seringue, des pièces de monnaies, la couverture d’un livre représentant une icône (Cf. '''Photogramme – 53.'''), une mitraillete, des bouts de fil barbelés, un ressort (Cf. '''Photogramme – 54.'''), des lambeaux de pages de livre, une sorte de vieille pipe et enfin, flottant sur l’eau, la main du Stalker en gros plan (Cf. '''Photogramme – 55.''').
'''<span id="ancre_91">Plan</span> 91''' : ''1h 23' 50"'' : Gros plan du Stalker. Il est toujours allongé, mais le haut de sa tête est vers le bas. Il dort. Il ouvre doucement les yeux et il se redresse. <br/>
- Stalker : « ''Ce jour-là, deux d’entre eux… . '' ('''<span id="ancre_92">Plan</span> 92''' : ''1h 24' 20"'' : Gros plan du Professeur endormi. ) '' allaient vers un village situé à … et s’entretenaient de ce qui s’était passé. Et pendant qu’ils parlaient… '' (On découvre le visage de l’Écrivain, appuyé contre le ventre du Professeur. ) '' lui s’approcha et fit route avec eux. Mais leurs yeux ne pouvaient le voir… si bien qu’il ne le reconnurent pas. '' (L’Écrivain ouvre les yeux.) '' Il leur dit : de quoi parlez-vous… et pourquoi êtes-vous tristes ? L’un d’eux, appelé… '' (Le Professeur ouvre les yeux. '''<span id="ancre_93">Plan</span> 93''' : ''1h 25' 20"'' : Le Stalker tourne la tête vers nous.) '' Vous voilà réveillés ? Vous parliez du sens de… '' ('''<span id="ancre_94">Plan</span> 94'''.) '' notre … vie… de l’art désintéressé. La musique, par exemple… elle est, moins que tout, liée à la réalité. Y serait-elle liée, c’est sans idéologie, mécaniquement…. Par un son creux, sans associations… Et pourtant, la musique, comme par miracle, pénètre dans le fond de l’âme ! Qu’est-ce qui résonne en nous au bruit, devenu harmonie ? Et le transforme en source d’extrême volupté… . '' ('''<span id="ancre_95">Plan</span> 95''' : ''1h 26' 18"'' : Le Professeur et l’Écrivain regardent vers le Stalker. ) '' … qui nous unit et nous bouleverse ! Pour quoi tout cela, et pour qui ? Vous répondrez : pour personne et pour rien. C’est « désintéressé ». Et bien, non. C’est peu probable. Car tout, finalement, a un sens. Un sens et une raison d’être. '' »
Fondu au noir.
'''<span id="ancre_96">Plan</span> 96''' : ''1h 27' 10"'' : Vue d’un large tunnel incurvé très sombre. Des ouvertures au plafond projettent un peu de lumière du jour sur le sol boueux. On entend le bruit amplifié par l’écho d’une porte qui s’ouvre. (Cf. '''Photogramme – 56.''')
- L’Écrivain : (off)« '' C’est par là qu’il faut aller ? '' <br/> - Stalker : (off) ''Hélas, il n’y a pas d’autre voie. '' »<br/>
'''<span id="ancre_97">Plan</span> 97''' : ''1h 27' 40"'' : Les trois hommes sont au seuil du tunnel. L’Écrivain est appuyé contre le sas en fer recouvert d’épaisse poussière et de toiles d’arraignées. Le professeur est à côté de lui, à droite. Derrière, le Stalker.
- L’Écrivain : (off)« '' C’est plutôt sombre, hein, Professeur ? Je ne tiens pas à m’y aventurer le premier. Serpent rusé ne se porte pas volontaire. '' <br/>
- Stalker : (off) ''Tirons au sort. Vous n’êtes pas contre ?'' <br/>
- L’Écrivain : '' Si. Je préfèrerais un volontaire. '' (Le Stalker s’avance près d’eux.)<br/>
- Stalker : '' Avez-vous des allumettes ? '' (Le Professeur sort une boîte de sa poche et la lui donne.) '' Merci. '' (Le Stalker passe entre les deux hommes et vient se placer légèrement à droite. Il casse une allumette, et se retourne vers eux.) ''La plus longue ira en premier. '' (Cf. '''Photogramme – 57.''') (Il tend sa main avec les deux allumettes entre ses doigts.) '' Tirez.'' (L’Écrivain tire une allumette.) '' Cette fois-ci vous n’avez pas eu de chance. ''»
Le Stalker jette son allumette, l’Écrivain porte l’allumette à sa bouche et s’avance, (Cf. '''Photogramme – 58.''') il considère à nouveau le tunnel : « ''Vous devriez y jeter un écrou. '' <br/>
- Stalker :(off) ''Bien sûr... voilà. '' (Il cherche autour de lui, et ramasse un objet qu’on ne voit pas. L’Écrivain lui laisse la place. Le Stalker lève sa main armée d’un gros caillou qu’il lance dans le tunnel. (Cf. '''Photogramme – 59.''') Il se dégage de l’entrée en fermant violemment la porte devant lui. Puis il la rouvre. Le Stalker demande à L’Écrivain : '' Encore un ? '' <br/>
- L’Écrivain : ''Bon… J’y vais. '' »<br/>
- Le Professeur : ''Une ampoule cachée quoi ! Du poison. '' <br/>
- Stalker : ''C’est pour mourir que vous êtes venu ici ? '' <br/>
- Le Professeur : '' On ne sait jamais, j’ai une ampoule. '' » (Il traverse la partie immergée, le sac tenu-au-dessus de sa tête.) (Cf. '''Photogramme – 63.''')
Le plus bel exemple de l'invocation de cette "quatrième dimension" au sens figuré et au sens réel se trouve au plan 116b. En effet, ce n'est que longtemps après que nous entendons un premier impact de la pierre contre les parois du puits. L'Écrivain s'assied au bord du puits, et nous entendons un second bruit qui provient du puits.
Andreï Tarkovski a un goût prononcé pour la profondeur de champ. Elle est souvent dédoublée par l'utilisation de panoramique ou par une vue en plongée, comme la scène avec le [[Ballon (aérospatiale)|ballon]] dans le prologue d'''[[Andreï Roublev]]''. Ici, nous avons la profondeur invisible du sol, c'est-à-dire la profondeur du puits, comme si la pierre "crevait", littéralement, "le plancher de l'image". D'autre part, la reconversion tarkovskienne s'enchaîne comme il se doit par la parole, autre élément de la bande-son. L'Écrivain assis au bord du puits, en attente, au bord du "gouffre de l'inspiration", commence un long monologue : "''Encore une expérience. Les expériences, les faits… Mais les faits n'existent pas, ici surtout. (…) Quel foutu écrivain suis-je, si je hais l'écriture ? Écrire, c'est un supplice, une humiliation, comme s'extirper des hémorroïdes. (…) Je pensais les changer, c'est moi qu'on a changé (…) Autrefois l'avenir était le prolongement du présent… A présent l'avenir se confond avec le présent. Sont-ils prêts à cela ? Ils ne veulent rien savoir, ils ne font que s'empiffrer !'' " C'est face à la caméra, face au monde, que l'Écrivain dévoile à haute voix ses pensées <ref> Qui sont peut-être les pensées même d' Andreï Tarkovski, ce qui explique le fait que l'Écrivain parle face au "monde". Souvent un auteur parle par l'intermédiaire de ses acteurs. Comme dans le prologue du ''[[Miroir (Le)|Miroir]]''. </ref> : il est venu dans la Zone, parce qu'il avait perdu l'inspiration, cela nous le savons dès les présentations, au bar, au [[#ancre_16a|plan 16a.]] <ref>- L'Écrivain : (Au Professeur.) "« ''Quel besoin avez-vous de la Zone ?'' "<br/>
- Le Professeur : " ''D'une certaine façon, je suis un savant. Et vous, quel besoin en avez-vous ?''<br/>
- L'Écrivain : " ''J'ai perdu l'inspiration…''"» <br/>
- Le Professeur : " ''Alors, votre plume est tarie ?'' </ref> A présent, (plan 116) l'Écrivain est devant un "puits tari", un puits qui ne lui livre que l'écho de son vide, d'un long vide. De plus, il cherchait "l'inspiration vénale", au [[#ancre_85|plan 85.]]
''Les branches n’ont pas cassé. ''<br/>
''Le jour est clair comme du verre. ''<br/>
''Mais cela ne suffit pas. '' »<br/>''Ils sont bien, ses vers, pas vrai ? '' »
[[Fichier: Stalker_Tarkovski_Plan_119_Piece_01_Chien.jpg|300px|thumb|right|alt=''Stalker'', '''Photogramme - 69''' : '''Plan 119.''' Du fond d’une grande pièce, s’avance le chien noir qui traverse la pièce. | ''Stalker'', '''Photogramme - 69''' : '''Plan 119.''' Du fond d’une grande pièce, s’avance le chien noir qui traverse la pièce.]]
- L’Écrivain : (off) « ''As-tu fini de faire l’article ? Oui, c’est bien. Tu en es écoeurant. '' <br/>
- Stalker : ''Si vous saviez comme je suis heureux ! Il est rare que tout le monde arrive à destination. Vous êtes bon et honête, je suis fier d’avoir vu juste. '' <br/>
- L’Écrivain : '' Le voilà fou de joie que tout se soit bien passé. « Le Destin », « la Zone », je suis un homme admirable… ! Tu crois que je n’ai pas vu… Excusez-moi, Professeur, je ne veux pas vous blesser, mais ce salopard a fait de vous son chouchou… '' <br/>
- Stalker : (off) ''Que dites-vous là ? '' »<br/>
'''<span id="ancre_119">Plan</span> 119''' : ''1h 48' 14"'' : Plan d’ensemble d’une grande pièce en béton, le sol est recouvert d’eau et d’objets en forme de ballon de verre. Du fond s’avance le chien noir qui traverse la pièce. (Cf. '''Photogramme – 69.''')
- L’Écrivain : (off)« ''… et moi, individu inférieur, j’étais bon pour le tunnel. Le « hachoir », quel mot ! ''(Le chien s’arrête.) ''De quel droit peux-tu choisir…entre la vie et le hachoir ? '' »
Le Stalker se dirige vers une ouverture d’où parvient un peu de lumière. Pépiements d’oiseaux. Il s’accroupit devant l’entrée de la « Chambre ». Le Professeur et l’Écrivain le rejoignent. (Cf. '''Photogramme – 73.''')
- Stalker : « '' Je sais que ça va vous fâcher…. Mais je dois quand même vous le dire…'' (Il se lève. ''' <span id="ancre_124">Plan</span> 124''' : ''1h 57' 42."'' Il tourne la tête vers les deux hommes derrière lui.) ''Nous nous trouvons là… au seuil… C’est le moment le plus important de votre vie. Sachez qu’ici… votre souhait le plus cher sera exaucé. Votre souhait le plus sincère… le plus douloureux… Ne dites rien. Il faut se… concentrer… essayer de se rappeler toute sa vie… Quand l’homme pensé à son passé, il devient meilleur. Le principal… le principal… C’est d’avoir la foi… Maintenant allez-y. Qui passe le premier ? '' (Il tourne vers l’Écrivain.) '' Vous, peut-être ? '' »
<center>* </center>
'''<span id="ancre_125">Plan</span> 123''' : ''2h 00' 02"'' : Gros plan de l’Écrivain. <br/>
- L’Écrivain : « ''Moi ? je ne veux pas. '' <br/>
- Stalker : (off) ''Je sais, ce n’est pas si facile. Ne craignez rien, ça passera. '' <br/>
- L’Écrivain : ''Cela m’étonnerait… que ça passe… '' (Il avance face caméra.) '' D’abord, en me souvenant de ma vie. Je ne deviendrais pas meilleur. Et puis, ne sens-tu pas à quel point… à tel point, c’est… bas ? '' (De dos, il s’avance vers les deux hommes en jetant la couronne d’épine. Il ramasse un caillou au pied du Stalker, le jette dans un geste désœuvrement. Derrière eux, le Professeur fouille dans son sac.) '' S’abaisser, pleurnicher, prier ? '' <br/>
- L’Écrivain : '' Quoi, quoi, c’est une blague ? '' <br/>
Le Professeur dévisse une partie du cylindre.<br/>
- Le Professeur : '' Non, c’est tout simplement une bombe. '' (Il la tient d’une main, l’exposant aux regards des deux hommes.)'' Vingt kilotonnes. '' »(Cf. '''Photogramme – 74.''')
'''<span id="ancre_126">Plan</span> 126''' : ''2h 02' 25"'' : Gros plan en plongée de la bombe. Sur le dessus de la partie dévissée, on voit des boutons en acier.<br/>
- Le Professeur : (off) « ''Je l’avais fabriquée avec des amis. '' (Il la prend entre ses mains.) '' Avec mes anciens collaborateurs. '' (Il dévisse une autre partie qu’il pose au sol. Il place un tube dans l’orifice central.) '' Cet endroit n’apportera de bonheur à personne. '' (Il revisse la partie qu’il avait dégagée.) '' Et si cet engin tombe entre de mauvaises mains… Du reste, je ne sais même plus, à présent. On avait pensé à l’époque, qu’ il ne fallait quand même pas détruire la Zone. Car, même si c’est un miracle, c’est une partie de la nature. C’est donc l’espoir, en un certain sens. Ils ont donc caché la mine… Et je viens de la trouver. '' (Il rit.) '' « Ancien bâtiment, quatrième Bunker ». Il existe certainement une loi : ne jamais commettre d’actions irréversibles. Et je le comprends très bien. '' (Il tourne la tête vers la Chambre.)'' Tant que cet ulcère est ouvert ici… pour n’importe quelle fripouille… il n’y aura ni sommeil ni repos. A moins que le secret de l’âme ne l’interdise ? '' »
<center>* </center>
 
 
======L’Écrivain s'interpose entre les deux hommes======
 
 
<span id="ancre_127p"> </span>
[[Fichier: Stalker_Tarkovski_Plan_127_Homme civilisé.jpg|300px|thumb|right| alt=''Stalker'', '''Photogramme - 75''' : '''Plan 127.''' Le Professeur est surpris du comportement de l’Écrivain qui repousse le Stalker : « ''Enfin, vous êtes un homme civilisé ! '' »|''Stalker'', '''Photogramme - 75''' : '''Plan 127.''' Le Professeur est surpris du comportement de l’Écrivain qui repousse le Stalker : « ''Enfin, vous êtes un homme civilisé ! '' »]]
 
 
'''<span id="ancre_127">Plan</span> 127''' : ''2h 04' 08"'' : Gros plan de l’Écrivain. <br/>
- L’Écrivain : « ''Il a trouvé un problème à résoudre ! » ''
 
Lent zoom arrière. Plan d’ensemble de la pièce. Le Stalker, d’un bond se jette sur le Professeur et tente de lui prendre la bombe des mains. <br/>
- Stalker : «'' Donnez-moi ça ! '' (L’Écrivain le repousse au fond de la pièce, dans l’eau.) <br/>
- Le Professeur (à l’Écrivain) : ''Enfin, vous êtes un homme civilisé ! '' (Cf. '''Photogramme – 75.''') (Le Stalker se relève, trempé, et se jette sur le Professeur. L’Écrivain le renvoie dans l’eau.)<br/>
- L’Écrivain : '' Espèce de sale larve hypocrite. '' (Le Stalker se relève difficilement essouflé.)<br/>
- Stalker : ''Pourquoi me traitez-vous ainsi ? C’est lui qui veut tout détruire. '' (Encore une tentative du Stalker pour s’emparer de la bombe, l’Ecrivain le repousse.) '' C’est l’unique endroit ou l’on peut venir ? Lorsqu’il n’y a plus rien à espérer. Vous êtes bien venus, vous. Pourquoi détruisez-vous la foi ? '' (Il s’avance à nouveau pour prendre la bombe. L’Écrivain l’intercepte.) <br/>
- L’Écrivain : ''Vas-tu taire ? Vas-tu te taire ! Je vois clair en toi. Tu t’en fous, des gens ! Tu gagnes du fric… sur notre angoisse. Et même sans fric, tu jouis ici, car tu y est tout puissant, espèce de larve ! Tu décides de notre vie ou de notre mort. '' (Il se retourne vers le Professeur.) '' Dire que c’est lui qui choisit ! Voilà pourquoi les Satlkers n’entrent jamais dans la Chambre. C’est ici que vous savourez votre puissance… et votre autorité. Il ne reste plus de désirs.'' »<br/>
 
'''<span id="ancre_128">Plan</span> 128''' : ''2h 06' 43"'' : Gros plan en plongée du Stalker. <br/>
- Stalker : « ''Ce n’est pas vrai, vous vous trompez. Un Stalker n’a pas le droit d’entrer dans la Chambre. Ni d’aller dans la Zone dans un but intéressé. Souvenez-vous de Porc-èpic. (…) Mais ne m’enlevez pas ce qui est à moi. On m’a déjà tout pris derrière les barbelés. Ce qui m’appartient est ici-même, dans la Zone ! Mon bonheur, ma liberté, ma dignité, tout est là. Je conduis ici des gens comme moi, des malheureux. (…) Et personne d’autre que moi ne peut les aider. Moi, je peux, moi, la larve ! J’en pleure de bonheur, de les aider ! C’est tout, je ne veux rien de plus.'' »<br/>
 
'''<span id="ancre_129">Plan</span> 129''' : ''2h 08' 05"'' : Gros plan du Professeur. Il se dirige vers la gauche.
 
'''<span id="ancre_130">Plan</span> 130''' : ''2h 08' 22"'' : Plan moyen de l’Écrivain.
 
- L’Écrivain : «'' Peut-être bien… alors, excuse-moi, mais… Tu n’es qu’un simple d’esprit. Tu n’as aucune idée de ce qui se passe ici. Pourquoi Porc-épic s’est-il pendu ? '' <br/>
- Stalker : (off) ''Il est venu ici dans un but intéressé et pour de l’argent… il a fait périr son frère dans le « hachoir ». '' <br/>
- L’Écrivain : ''Mais pourquoi s’est-il pendu malgré tout, et n’est-il pas revenu, non pour l’argent, mais pour son frère ? Puisqu’il s’était repenti ? '' <br/>
- Stalker : (off) ''Il le voulait, mais peu après, il s’est pendu. '' <br/>
- L’Écrivain : '' Il a compris que dans la Chambre… seuls les vœux les plus sacrés étaient exaucés. Pour le reste, tu peux toujours crier… '' (Le Stalker s’assoit par terre.) '' Ici se réalise ce qui correspond à la nature profonde… que tu ne soupçonnes même pas, et qui dirige toute ta vie. '' (…) (L’Écrivain est au seuil de la chambre.) '' Je n’irai pas dans ta Chambre. '' (Le Professeur s’agenouille) ''Je ne déverserai pas sur la tête d’autrui… toutes les saletés de mon âme. Pour me pendre ensuite, comme Porc-épic. Je préfère me noyer dans l’alcool à notre Club des Écrivains. (...) Et après tout… qui t’a fait croire que ce miracle peut avoir lieu ? (...) Avez-vous vu un seul homme sortant d’ici, comblé ? '' (Au Professeur) '' Au fait, qui vous a parlé… de la Zone, de Porc-épic, de la Chambre ? '' <br/>
- Le Professeur : ''Lui. '' »<br/>
 
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