Synchronicité

De Cinémancie
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Little Buddha. Siddhartha médite depuis six ans sous un immense arbre, près d'une rivière. Au plan suivant :


Little Buddha. Sur une barque passe un maître en musique, qui dit à ses élèves : "La corde trop tirée se casse, la corde pas assez tirée ne sonne pas." Ce fut la grande révélation du "juste milieu" pour Siddhartha.


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Synchronicité et Paraclesica de C. G. Jung

Il nous semble que les exemples qui vont suivre, ceux du psychologue C. G. Jung, tirés de son livre, Synchronicité et Paraclesica, [1], offrent un angle d'approche pertinent pour appréhender des questions d'ordre acausal, des questions qui n'obéissent pas au principe philosophique qui fonde notre conception de la légalité naturelle. Ces questions concernent des événements uniques ou rares. Le cinéma présente souvent des représentations de ces événements, comme par exemple, le film de David Lynch, Lost Highway, en particulier la présence étrange de Mystery Man et la « volatilisation - transformation » de Fred Madison en un jeune garagiste. Nous reviendrons sur ces aspects ultérieurement, pour le moment, nous livrons les cas de Jung, car nous sommes persuadé que le cinéma offre un terrain de recherche propice pour découvrir un monde insoupçonnable. En deux mots. Le cinéma reste un « continent » à conquérir.


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Insecte (scarabée)

« Dans un moment décisif de son traitement, une jeune patiente eut un rêve ou elle recevait en cadeau un scarabée d'or. Tandis qu'elle me racontait son rêve, j'étais assis le dos tourné à la fenêtre fermée. Soudain, j'entendis derrière moi un bruit, comme si quelque chose frappait légèrement à la fenêtre. Me retournant je vis qu'un insecte volant à l'extérieur heurtait la vitre. J'ouvris la vitre et attrapai l'insecte au vol. Il offrait avec un scarabée d'or l'analogie la plus troublante qu'il soit possible de trouver sous nos latitudes : c'était un scarabéidé de la famille des lamellicornes, hôte ordinaire des rosiers : une cétoine dorée, qui s'était apparemment sentie poussée, à l'encontre de ses habitudes normales, à pénétrer juste à cet instant dans une pièce obscure.Je suis bien obligé de dire qu'un tel cas ne s'était jamais présenté à moi auparavant ni ne s'est représenté par la suite; de même ce rêve qu'avait eu ma patiente est resté unique en son genre dans le champ de mon expérience. » (Jung, Synchronicité et Paraclesica, p. 39.)

Ce qui est cinématographiquement fascinant dans cet exemple, c'est l'expression temporelle « juste à cet instant », une précision dans la simultanéité de deux faits. Il faut noter, par ailleurs, que « la relation de simultanéité » de Schopenhauer, est à l'origine des travaux de Jung. Il choisit alors le terme de la « Synchronicité ».


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Nombre

« Si par exemple je constate que mon billet de tram porte le même numéro que le billet de théâtre que j'achète aussitôt après, et si le même soir en outre, appelé par téléphone, j'entends mentionner comme numéro de téléphone le même nombre, une relation causale me paraîtra d'une extrême invraisemblance. » (S.P. p. 26.) Jung va démontrer que les concepts qu'avance Paul Kammerer (Das Gesetz der Serie) : « sérialité, imitation, attraction et inertie prennent place dans une image causaliste du monde, et ne disent rien de plus que l'accumulation de hasards elle-même. » (S.P. p. 27.) Ainsi, Jung propose de saisir la sérialité par la méthode quantitative, seule la méthode statistique « permet d'espérer le succès ». (S.P. p. 28.)


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Nom

« Le phénomène que Stekel a appelé « l'obligation par le nom » : Il s'agit de coïncidences parfois bizarres entre le nom d'un être et sa nature spécifique. Par exemple, M. Legrand est atteint de mégalomanie, M. Petit souffre d'un complexe d'infériorité. Deux sours Vieilhomme épousent, toutes les deux des hommes de vingt ans plus âgés qu'elles ; M. Gras est ministre de ravitaillement, M. Maquignon avocat, M. Vêleur obstétricien ; M. Freud (= joie) défend le principe de plaisir, M. Adler (= aigle) la volonté de puissance, M. Jung (= jeune) l'idée de renaissance, etc. S'agit-il là de caprices du hasard, privés de sens, ou d'effets de suggestion produits par le nom, comme Stekel semble le supposer - ou de « coïncidences signifiantes » ? (Jung, Synchronicité et Paraclesica, p. 109.)

Pour revenir aux exemples de Jung, il écrit qu'il est quelque peu embarrassé pour savoir ce que l'on doit penser du phénomène que Stekel a appelé « l'obligation par le nom » (Mollsche Zeitschrift fûr Psychothérapie, III, 1911, p. 110 sq.).

A propos du nom, voir notre analyse concernant Andreï Roublev.


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Oiseaux

« Au cours d'une conversation, la femme d'un de mes patients, me raconta qu'à la mort de sa mère et de sa grand-mère des oiseaux s'étaient rassemblés en grand nombre devant les fenêtres de la chambre de la mourante ; des récits de ce genre, d'autres gens m'en avaient déjà fait plus d'une fois. Lorsque l'analyse du mari approcha de son terme, on vit se manifester chez lui des symptômes d'une affection cardiaque. Je l'envoyai chez un spécialiste. S'en retournant chez lui au sortir de cette consultation, (...) mon patient s'effondra soudain dans le rue. Lorsqu'on le ramena, mourant, à son domicile, sa femme était déjà dans l'angoisse : peu après son départ pour la consultation, tout un essaim d'oiseaux s'était abattu sur la maison. Elle s'était naturellement aussitôt rappelé que la même chose à peu près s'était passée lors de deux décès dans sa famille, et craignait le pire. » (S.P. p. 39.)

« Il ne paraît pas possible d'établir un rapport entre le décès et l'essaim d'oiseaux. Pourtant si l'on considère que dans l'Hadès babylonien déjà les âmes portent un « vêtement de plumes » et que dans l'Egypte ancienne le ba - l'âme - est conçu comme un oiseau, il est assez tentant de poser l'hypothèse d'un symbolisme archétypique. » (S.P. p. 40.)

« (...) Il existe, dans cette situation, une évidente simultanéité entre l'essaim d'oiseaux, avec sa signification traditionnelle, et la mort du mari. Si nous faisons abstraction d'une activation certes possible mais indémontrable de l'inconscient, l'état psychique apparaît comme dépendant de ce qui se passe au-dehors.[2] » (S.P. p. 43.)

L'interprétation des oiseaux comme présage, omen, reposait ainsi qu'on l'a vu sur deux coïncidences antérieures de même nature. Lors de la mort de la grand-mère, il n'y avait pas encore d'interprétation : il y avait simple coïncidence entre le décès et le rassemblement des oiseaux. Dans ce premier cas la coïncidence était d'une évidence immédiate ; dans le troisième elle ne put être vérifiée comme telle que quand le mourant fut ramené chez lui. » (S.P. p. 24.)


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Poissons

« J'ai noté à la date du 1er avril 1949 le cas suivant : c'est aujourd'hui vendredi. A midi, nous avons du poisson. Quelqu'un rappelle incidemment la coutume du « poisson d'avril ». Le matin, j'ai pris note d'une inscription : « Est homo totus medius piscis ab imo. » L'après-midi, une ancienne patiente que je n'ai plus revue depuis des mois me montre quelques images de poissons particulièrement impressionnantes qu'elle a peintes entre-temps. Le soir, on me montre un ouvrage de broderie figurant des monstres marins pisciformes. Le 2 avril au matin une ancienne patiente, que je n'ai plus revue depuis bien des années, me raconte un rêve où, se trouvant au bord d'un lac, elle aperçoit un grand poisson qui nage tout droit vers elle et vient pour ainsi dire « atterrir » à ses pieds. A cette époque, je me livre à des recherches sur le symbolisme du poisson à travers l'histoire ; une seule des personnes ici concernées en a connaissance. » (S.P. p. 28.) Jung termine plus loin son propos en disant que « les accumulations ou séries constituées de choses que l'on rencontre fréquemment doivent être considérées jusqu'à nouvel ordre comme imputables au hasard. » (S.P. p. 29)

Jung ajoute dans une note, pour compléter son propos, le fait suivant : « Je voudrais signaler que j'ai écrit ces lignes au bord de notre lac. Ma phrase terminée, j'ai fait quelques pas sur le mur qui borde le lac : il y avait là, sur le mur, un poisson d'environ 30 centimètres de long, mort mais sans blessure apparente. La veille au soir il ne s'y trouvait pas. (On peut supposer qu'il avait été tiré de l'eau par un oiseau de proie ou par un chat.) Ce poisson-là était le septième de la série. » (S.P. p. 109.)

Nous rappelons que ces écrits datent de 1951, par conséquent, tout en sachant que nous avançons sur un terrain incertain, il nous semble qu'un ordre nouveau peut surgir du cinéma.


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Voir aussi


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Notes et références

  1. Éditions Albin Michel, 1988, 1ère publication 1951
  2. C'est nous qui soulignons
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