« Oiseau » : différence entre les versions

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Nous avons une figure majeure du film. Cette figure particulière aborde, aspire et confond trois figures dominantes du film : l'oiseau, le [[feu]] et le [[vent]]. En somme, nous n'avons presque plus affaire à une figure déterminante, non plus à une thématique, mais nous assistons en fin de compte à l'élaboration d'un mythe. Pierre Grimal précise que le mot grec qui sert à désigner le mythe (...) "(&mu;&nu;&theta;&omicron;&sigmaf;) s'applique à toute histoire que l'on raconte. (…) Le mythe s'oppose au "logos" comme la fantaisie à la raison. "Logos et Mythos sont les deux moitiés du langage, deux fonctions fondamentales de la vie et de l'esprit." <ref>'''Pierre Grimal''', ''La Mythologie grecque'', P.U.F. (1953) 1986, pp. 6-7.  </ref> Pierre Lavedan, voit "un ensemble de symboles très anciens, destinés primitivement à envelopper les dogmes philosophiques et des histoires morales, dont le sens se serait perdu ; (…) De la philosophie poétisée." <ref>'''Pierre Lavedan''', ''Dictionnaire illustrée de la mythologie et les antiquités grecque et Romaines'', Paris, 1931, p. 684.  </ref> Mais, Le Miroir est un film, et non une histoire. Son auteur l'a voulu ainsi : (…) " Nous ne pouvons pas percevoir l'univers dans sa totalité. Mais l'image peut exprimer cette totalité." <ref>'''Andreï Tarkovski''', ''Le Temps Scellé'', ''[[Thèse:Bibliographie#ancre_1|op. cit.]]'', p. 100.  </ref>  Ainsi, nous comprenons mieux, à présent, cette citation si importante. L'auteur cherche la totalité. Il sait que l'image "peut" exprimer cette totalité ; mais elle ne l'exprime pas d'emblée. Nous pensons que c'est pour cette expression totalisante que l'auteur s'appuie (ici et ailleurs) sur les trois figures citées. Mais nous pensons aussi qu'un seul plan dans le film, à lui seul, exprime l'ensemble des trois figures : c'est le [[Feu#ancre_124p|plan 124]], lorsque Ignat brûle dans la cour, ce que l'on a appelé [[Feu#Variation d’éclairage, le mythe du sphinx et l'énigme du coq |"le sphinx"]] ( Xème épisode. "Le Buisson ardent."). Nous l'avons vu en insert. Il propose un développement des plans du buisson. Ainsi, le vent, le feu et l'oiseau sont constamment enchaînés, ils se répondent l'un à l'autre. Ils sont même, comme nous allons le voir, l'un dans l'autre, non pas dans un sens matérialisable ou concret, mais dans un sens abstrait, qui converge à notre avis, comme nous l'avons annoncé vers un sens "sacré". Le sens sacré est pris dans le sens de Roger Caillois : "Ce qui se distingue du profane. (…) Le sacré apparaît ainsi une catégorie de la sensibilité. (…) C'est la catégorie sur laquelle repose l'attitude religieuse. " <ref>'''Roger Caillois''', ''L'Homme et le sacré,'' Gallimard, Paris, 1950, p. 23.  </ref>
Nous avons une figure majeure du film. Cette figure particulière aborde, aspire et confond trois figures dominantes du film : l'oiseau, le [[feu]] et le [[vent]]. En somme, nous n'avons presque plus affaire à une figure déterminante, non plus à une thématique, mais nous assistons en fin de compte à l'élaboration d'un mythe. Pierre Grimal précise que le mot grec qui sert à désigner le mythe (...) "(&mu;&nu;&theta;&omicron;&sigmaf;) s'applique à toute histoire que l'on raconte. (…) Le mythe s'oppose au "logos" comme la fantaisie à la raison. "Logos et Mythos sont les deux moitiés du langage, deux fonctions fondamentales de la vie et de l'esprit." <ref>'''Pierre Grimal''', ''La Mythologie grecque'', P.U.F. (1953) 1986, pp. 6-7.  </ref> Pierre Lavedan, voit "un ensemble de symboles très anciens, destinés primitivement à envelopper les dogmes philosophiques et des histoires morales, dont le sens se serait perdu ; (…) De la philosophie poétisée." <ref>'''Pierre Lavedan''', ''Dictionnaire illustrée de la mythologie et les antiquités grecque et Romaines'', Paris, 1931, p. 684.  </ref> Mais, Le Miroir est un film, et non une histoire. Son auteur l'a voulu ainsi : (…) " Nous ne pouvons pas percevoir l'univers dans sa totalité. Mais l'image peut exprimer cette totalité." <ref>'''Andreï Tarkovski''', ''Le Temps Scellé'', ''[[Thèse:Bibliographie#ancre_1|op. cit.]]'', p. 100.  </ref>  Ainsi, nous comprenons mieux, à présent, cette citation si importante. L'auteur cherche la totalité. Il sait que l'image "peut" exprimer cette totalité ; mais elle ne l'exprime pas d'emblée. Nous pensons que c'est pour cette expression totalisante que l'auteur s'appuie (ici et ailleurs) sur les trois figures citées. Mais nous pensons aussi qu'un seul plan dans le film, à lui seul, exprime l'ensemble des trois figures : c'est le [[Feu#ancre_124p|plan 124]], lorsque Ignat brûle dans la cour, ce que l'on a appelé [[Feu#Variation d’éclairage, le mythe du phénix et l'énigme du coq |"le phénix"]] ( Xème épisode. "Le Buisson ardent."). Nous l'avons vu en insert. Il propose un développement des plans du buisson. Ainsi, le vent, le feu et l'oiseau sont constamment enchaînés, ils se répondent l'un à l'autre. Ils sont même, comme nous allons le voir, l'un dans l'autre, non pas dans un sens matérialisable ou concret, mais dans un sens abstrait, qui converge à notre avis, comme nous l'avons annoncé vers un sens "sacré". Le sens sacré est pris dans le sens de Roger Caillois : "Ce qui se distingue du profane. (…) Le sacré apparaît ainsi une catégorie de la sensibilité. (…) C'est la catégorie sur laquelle repose l'attitude religieuse. " <ref>'''Roger Caillois''', ''L'Homme et le sacré,'' Gallimard, Paris, 1950, p. 23.  </ref>


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====Interprétations et symbolismes====
====Interprétations et symbolismes====

Version du 16 mars 2013 à 01:39

La Fille du Botaniste.

Li Min, l’orpheline et Chen An, la fille du botaniste relâchent dans une nature luxuriante des oiseaux, afin de réaliser leurs vœux.
En effet, peu avant, il rencontrent un marchand d’oiseau, Li Min, demande : « Ça sert à quoi tout ses oiseaux. »
- Le Marchand : « Ces oiseaux sont des tourterelles destinées aux pèlerins. S’ils ont un vœux à réaliser, ils les achètent et les relâchent. A chaque vœu correspond un nombre précis de tourterelles. »
- Chen An : « Et, il se réalise ? Si deux personnes font le vœu d’un amour éternel, c’est combien d’oiseaux ? »
- Le Marchand : «  Soixante-quatre. »
- Li Min : « Et, pour deux personnes soient à jamais séparer ? »
- Le Marchand : « Il en faut 108, c’est le plus propice des nombres, celui des sûtras des canons bouddhiques. »


Titres des films

Mode d'emploi de la figure (mot) et abréviations


Titre Titre original Réalisation Scénario Année Pays Durée (min.)
Comme un Oiseau sur la Branche Bird on Wire Badham John Lerner E., Seltzer D., Venosta L. 1990 USA 110
Oiseau d’Argile (L’) Matir Moina Masud Tareque Masud C., et T. 2002 Pakistan 94
Oiseau Noir (L’) The Blackbird Browning Tod Browning T., Young W. 1926 USA 80
Oiseaux (Les) The Birds. Hitchcock Alfred Hunter E. 1963 USA 115
Oiseaux petits et grands (Les) Ucellacci E Ucellini Pasolini Pier Paolo Pasolini P.P. 1966 Italie 90


* * *


Autres titres de films

Titre Titre original Réalisation Scénario Année Pays Durée
Andreï Roublev
§. Voir : Cygne
(Voir détail : Andreï Rublyov) Tarkovski Andreï Tarkovski A.
Konchalovsky A.
1969 URSS 215
Fille du botaniste (La) Fille du botaniste (La) Sijie Dai Sijie Dai,
Perront Nadine
2006 France, Canada 97
Fraises Sauvages (Les) Smultronstallet Bergman Ingmar Bergman I. 1957 Suède 92
Good Morning, Babylon Good Morning, Babylon Taviani Paolo et Vittorio Guerra Tonino [1], Taviani Paolo et Vittorio, d’après une idée de Fonvielle Lloyd 1987 France, Italie 118
Mathilde
§. Voir : Mouette
(Voir détail : Mathilde) Mimica Nina Mimica Nina 2004 Italie, Espagne, Angleterre, Allemagne 97
Miroir (Le) (Voir détail : Zerkalo) Tarkovski Andreï Tarkovski A.

Micharine A.

Et poèmes d'Arseni Tarkovski.
1975 URSS 106
Nostalghia (Voir détail : Nostalghia) Tarkovski Andreï Tarkovski A.
Guerra T.
1983 URSS
Italie
130
Pledge (The) Pledge (The) Penn Sean Kromolowski Jerzy, Olson-Kromolowski Mary 2001 USA 124
Stalker
§. Voir : Corbeau
(Voir détail : Stalker) Tarkovski Andreï Tarkovski A.
Strougatski A. et B.
1979 URSS 161
Visiteur (Le) Muukalainen Valkeapää Jukka-Pekka Forsström J.
Valkeapää J.-P.
2008 Finlande

Angleterre

Allemagne
139


* * *

Photogrammes extraits des films - Analyse et liens spécifiques des films

Les oiseaux dans Les Fraises sauvages, d’Ingmar Bergman

Photogramme - Oiseau 1 : Les Fraises Sauvages, Lors du sommeil d’Isak, l’envol d’oiseaux en surimpression, souligne le caractère énigmatique de l’image.
Photogramme - Oiseau 1 : Les Fraises Sauvages, Lors du sommeil d’Isak, l’envol d’oiseaux en surimpression, souligne le caractère énigmatique de l’image.

Ce film a de grands caractères cinémantiques. Il oscille entre le présent et le passé. Cette oscillation se manifeste à travers des moments de rêves ou de rêveries éveillées d'Isak Borg (Victor Sjöström), le principal protagoniste.

Ici, (Cf. Photogramme – Oiseau 1. ) Isak dort dans la voiture. Le réalisateur ajoute en surimpression l'image d'un envol d'oiseaux (Voir : Auspices), qui participe dans la construction inspirée de l'image.


*


Liens spécifiques du film

Voir : Fraises Sauvages (Les)


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Le Miroir, d'Andreï Tarkovski

Oiseau en feu et en vent

C’est la fin du film.

Plan 174 : 1h 34' 35" : Notre poète, comme Orphée, est inconsolable. Il est installé dans son lit, derrière un paravent. La dame en noir et la servante de l'épisode de la tasse de thé sont là. Est également présent un médecin :
- La dame : " Est-ce que ça peut vraiment venir d'une angine ?"
- Le médecin : " L'angine n'y est pour rien."

Du coup, cet épisode se situe, en fait, après le IVème épisode, "Le téléphone", quand notre poète dit à sa mère qu'il a une angine. [2] Nous remarquerons que le poète a le torse nu, mais nous ne verrons pas son visage. Un oiseau est à côté de lui avec quelques petites taches brunâtres. Il prend l'oiseau dans la main, et il le lance dans les airs.

Plan 176 : 1h 36' 23" : Changement de décor : l'oiseau, comme une flamme, s'irradie en un énorme champ vert, comme dans le 1er épisode. C'est d'ailleurs le même cadre. L'épouse et l'époux sont allongés sur l'herbe, enfin réunis : "que veux-tu le plus, une fille ou un garçon."

Plan 177 : 1h 37' 57" : Changement de temps : La grand-mère et le petit-fils sont face à face. Saut dans le temps ; matérialisation du temps : du puits auquel Maroussia c'est rincé le visage (plan 20), il reste la base en bois pourri, envahie de lichen. Le puits est vide, comme à côté, la bouteille vide. D'autres objets flottent dans une eau marécageuse. Sur le sentier d'une forêt luxuriante, la grand-mère prend la petite fille (la sœur d'Aliocha) par la main. Aliocha, derrière eux, crie joyeusement (retour indirecte au prologue, Aliocha non seulement, il va parler, mais aussi il va crier : plan 4). La caméra se retire par les bois, travelling arrière, vers nous, au fond des bois, c'est-à-dire au fond de nous-mêmes.(Technique utilisée également dans Stalker, au plan 131)

Fin du film : 1h 41' 27"

*

Est-ce que Le Miroir est un mythe cinématographique ?

Nous avons une figure majeure du film. Cette figure particulière aborde, aspire et confond trois figures dominantes du film : l'oiseau, le feu et le vent. En somme, nous n'avons presque plus affaire à une figure déterminante, non plus à une thématique, mais nous assistons en fin de compte à l'élaboration d'un mythe. Pierre Grimal précise que le mot grec qui sert à désigner le mythe (...) "(μνθος) s'applique à toute histoire que l'on raconte. (…) Le mythe s'oppose au "logos" comme la fantaisie à la raison. "Logos et Mythos sont les deux moitiés du langage, deux fonctions fondamentales de la vie et de l'esprit." [3] Pierre Lavedan, voit "un ensemble de symboles très anciens, destinés primitivement à envelopper les dogmes philosophiques et des histoires morales, dont le sens se serait perdu ; (…) De la philosophie poétisée." [4] Mais, Le Miroir est un film, et non une histoire. Son auteur l'a voulu ainsi : (…) " Nous ne pouvons pas percevoir l'univers dans sa totalité. Mais l'image peut exprimer cette totalité." [5] Ainsi, nous comprenons mieux, à présent, cette citation si importante. L'auteur cherche la totalité. Il sait que l'image "peut" exprimer cette totalité ; mais elle ne l'exprime pas d'emblée. Nous pensons que c'est pour cette expression totalisante que l'auteur s'appuie (ici et ailleurs) sur les trois figures citées. Mais nous pensons aussi qu'un seul plan dans le film, à lui seul, exprime l'ensemble des trois figures : c'est le plan 124, lorsque Ignat brûle dans la cour, ce que l'on a appelé "le phénix" ( Xème épisode. "Le Buisson ardent."). Nous l'avons vu en insert. Il propose un développement des plans du buisson. Ainsi, le vent, le feu et l'oiseau sont constamment enchaînés, ils se répondent l'un à l'autre. Ils sont même, comme nous allons le voir, l'un dans l'autre, non pas dans un sens matérialisable ou concret, mais dans un sens abstrait, qui converge à notre avis, comme nous l'avons annoncé vers un sens "sacré". Le sens sacré est pris dans le sens de Roger Caillois : "Ce qui se distingue du profane. (…) Le sacré apparaît ainsi une catégorie de la sensibilité. (…) C'est la catégorie sur laquelle repose l'attitude religieuse. " [6]

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Les trois plans majeurs du film

Le Miroir est donc un film de lutte, entre les charges superficielles et les charges ascensionnelles. Il ne s'agit pas de "traverser" le miroir, mais de le "dépasser", c'est-à-dire de dépasser le sens même de l'image. C'est le dépassement d'une proposition qui est en définitive, toujours virtuelle. Et quelles sont les figures qui transcendent au mieux cette ascension sinon les figures citées ? Il ne sera pas difficile de démontrer d'une part, les liaisons entre le feu et le vent sur les buissons (ardents), et d'autre part, entre le feu et l'oiseau. Résoudre la dernière équation, celle du feu et de l'oiseau, c'est résoudre trois plans majeurs du film :

*
Le plan 113, l'oiseau qui quitte l'arbre pour se poser sur la tête de l'orphelin

(Cf. Photogramme – Oiseau 2.)


*


Le plan 163, l'oiseau qui traverse le cadre, lors de la lévitation de Maroussia

(Cf. Photogramme – Oiseau 3.)


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Le plan 173, l'oiseau que le poète laisse partir

(Cf. Photogramme – Oiseau 4.)


Photogramme - Oiseau 4. : Le Miroir, Plan 173. L'oiseau libéré par le Poète.
Photogramme - Oiseau 4. : Le Miroir, Plan 173. L'oiseau libéré par le Poète.
*

Interprétations et symbolismes

Nous sommes tout d'abord tentés de proposer une figure sacrée, qui rappelle le rite de la fête chrétienne de la Pentecôte, celle de la descente du saint-Esprit sur les apôtres. Par ailleurs, Louis Séchan dans "le mythe de Prométhée", s'applique à souligner les modalités de la conquête du feu : (…) "Si le détenteur du feu varie, divinité créatrice, (…) c'est toujours un animal, et généralement un oiseau qui part en quête du trésor. Comme le voyage est bien long, même avec des ailes, et comme le retour est plein de danger, l'audacieux doit, souvent, appeler à l'aide et confier son butin à des camarades qui se relayent à leur tour, dans une sorte de lampadéphorie [7] animale." [8] D'autre part, Salomon Reinach observe que "l'aigle seul, croyait-on, pouvait regarder le soleil en face, et la puissance de son vol le désignait comme le plus capable d'approcher l'astre flamboyant d'où il eût pris la semence du feu." [9] Cette préfiguration animale conduit à Prométhée anthropomorphique, qui se vante d'avoir enseigné aux hommes l'art divinatoire. On énumère ainsi les divers aspects. [10] En outre, M.M. Davy nous apporte des éclairages supplémentaires : (…) "L'originalité de l'oiseau est de pouvoir échapper à la pesanteur animale. (…) L'oiseau est à la fois un messager et un porteur de signes. La lecture s'effectue sur des claviers différents : direction du vol, couleurs du plumage, chants, etc." [11]

*

Les présages par les oiseaux

De son côté, J. Defradas, insiste longuement sur le rang qu'occupent les présages par les oiseaux : (…) "Le nom même de l'oiseau, (οιθηος) est très vite devenu le synonyme du présage, parce que les présages étaient principalement tirés des oiseaux (ou "auspicia" en latin). [12] Dans l'Iliade, Calchas était qualifié d'οιθηοπολος, "spécialiste des oiseaux". [13] Aussi ne faut-il pas prendre pour de la fantaisie pure les prétentions qu'Aristophane met spirituellement au compte des oiseaux, qui s'attribuent fièrement le rôle le plus éminent dans la divination. [14] J. Defradas constate que les renseignements sur le rôle des oiseaux dans la divination sont dispersés dans toute la littérature ; les écrits techniques sur "l'ornithomancie" sont perdus, mais les scholiastes et les lexicographes, en ont conservé d'importantes observations. : (…) "Le témoignage des poètes et des philosophes montre que le côté favorable, c'est-à-dire la droite, coïncide avec la direction du soleil levant, vers laquelle s'ouvrait la porte des temples…" [15]


*

Les liaisons des figures comme déclencheur de métaphores

Il reste encore un point important, il s'agit des qualités et valeur des déplacements et des liaisons significatives des sens figurés et parlés dans le film. G. Bachelard inaugure son livre "Fragments d'une poétique du feu", en dépassant le cadre limité de l'objet, pour percer de plain-pied les horizons infinis du langage et de la poésie. Il nous semble que son analyse convient en particulier au cinéma poétique d'Andreï Tarkovski. En effet, il écrit : (…) "La poésie est un règne du langage. Une poétique doit travailler à instituer ce règne, à le rendre indépendant des obligations de cohérence des idées, indépendant des servitudes de la signification…" [16] Mieux encore, il se propose d'établir : " (son) débat sur la réalité d'une "sublimation absolue". Les poètes, dit Patrice de la Tour du Pin, ("La vie recluse en poésie.") trouvent "leur base en s'élevant". Cette base, c'est le seuil même de la sublimation absolue." [17] De plus, son débat nous ramène à la figure universelle du sphinx, en observant que : "L'image du sphinx est essentiellement une image devenue verbe, une image qui suscite une multiplicité de métaphores…" [18] Or, tout le cinéma poétique chemine à l'intérieur de métaphores, et par extension à l'intérieur des liaisons des métaphores. Ainsi, comme nous l’avons dit ailleurs, quand l'adolescent dit : "tournez-vous, ça veut dire 360°," l'entraîneur dubitatif répond : "quels degrés, tournez-vous". Voilà encore un clédon supplémentaire : nous avons vu par exemple, presque tous les degrés du feu : d'une cigarette jusqu'à la bombe atomique ; en passant entre autres par une image non moins négligeable, celle du feu et de la rousse aux lèvres fendues, celle du feu et de la femme aux cheveux de feu… Il suffit de s'arrêter sur une image du film, pour dégager d'autres constatations, d'autres observations.


*

Liens spécifiques du film

Voir : Miroir (Le)


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Nostalghia, d'Andreï Tarkovski

« La Madone del Prato » [19], les sentiers ou les voies de l’attente

Plan 4 : 5' 46" : La Traductrice entre dans une église. Des femmes voilées, agenouillées, prient. (Voir : Génuflexion )

Plan 9 : 8' 11" : La Traductrice décide de partir de l'église. Le prêtre lui dit : "Attends!" C'est un mot oraculaire. Plusieurs structures du film sont basées sur le concept de l'attente. (Voir : Attente).

Plan 10a : 10' 17" : L'attente de la Traductrice n'a pas été vaine. D'abord elle voit passer la procession de la vierge. (Cf. Photogramme – Oiseau 5.)


Ensuite elle assiste à un spectacle unique en son genre. Il s'agit d'une "ouverture symbolique" du ventre de la Vierge de la procession, dont va sortir "triomphalement", une nuée d'oiseaux, tout à coup extrêmement bruyants. [20] (Cf. Photogramme – Oiseau 6. )


Photogramme - Oiseau 6 : Nostalghia, Plan 10b. La sortie triomphante des oiseaux des "entrailles" de la Vierge.
Photogramme - Oiseau 6 : Nostalghia, Plan 10b. La sortie triomphante des oiseaux des "entrailles" de la Vierge.

L'oiseau est un thème récurrent dans le cinéma de Tarkovski, il tient une place privilégiée. Comme dans Andreï Roublev ou dans Le Miroir ou dans Stalker, ici encore, il sert (…) "de symbole aux relations entre le ciel et la terre. En grec, le mot même a pu être synonyme de présage et de message du ciel." [21] Il en va de même à Rome, où les auspices "auspicia" venant de "auis", l'oiseau, et "specis" voir, observer." [22] "Plus généralement encore, les oiseaux symbolisent les états spirituels, les anges, les états supérieurs de l'être." [23] A propos de "l'ornithomancie", " Ibn Halldûn déclare qu'il s'agit de la faculté de parler de (…) "l'inconnu qui s'éveille." [24]

Lire la suite , à propos des plumes. (Plans 14 – 18.)


*


« L’hôtel Palma » , 2ème partie – Rêves et présages

Après la visite du Poète de la « Maison de la fin du monde », et de son « initiation » par le « Fou » au Mystère de Sainte-Catherine. (Voir : Bougie.)

Le Poète est étonné de trouver sur son lit la Traductrice en train de se sécher les cheveux. Elle lui donne le prétexte qu'il n'y avait pas d'eau chaude dans sa chambre à elle. Le Poète n'y accorde aucune importance. Elle commence un discours sur un ton vindicatif de reproche : " Tu as peur… Tu as des complexes… Tu n'es pas libre… (…)" (Elle se dirige vers une fenêtre.) (74b) " À Moscou j'ai rencontré des hommes extraordinaires. (Elle ouvre la fenêtre.) L'image de la fenêtre "ouverte" s'oppose aux volets "fermés" par le poète (plan 27a). Aussitôt : " Que voulez-vous de moi ?" Elle dénude son sein droit. (74c) (Cf. Photogramme – Sein.)


La scène du dénuement du sein porte une profusion de sens, qui à première vue est à relier aux scènes d'ouverture et de fermeture de la fenêtre et du volet. Elle est aussi surtout reliée à la scène de "la Vierge aux oiseaux". Au plan 10, l'ouverture du ventre de la vierge est une ouverture symbolique. Tandis que le dévoilement du sein droit est une image hybride, qui oscille entre une invitation au désir et le devoir de la maternité [25], en fin de compte directement reliée avec le plan 65 : le lait renversé.



*


« L’hôtel Palma », 2ème partie – Le rêve du Poète

Plan 78a – 1 : 1h 13' 25" : ( 10è flash-back, en noir et blanc. 2ème série de quatre plans.) La femme du Poète se lève de son lit, comme si elle était inquiète ?

La femme du Poète se dirige vers un côté de la chambre ajourée de trois grandes fenêtres. Le rideau de la fenêtre du milieu est tiré. C'est la proposition d'un "espace alternatif". La femme se dirige vers la fenêtre du milieu, elle écarte le rideau du milieu (78b) : une colombe surgit. (Cf. Photogramme – Oiseau 7.)


Photogramme - Oiseau 6 : Nostalghia, Plan 78b-1. La disposition particulière des rideaux et la colombe.
Photogramme - Oiseau 7 : Nostalghia, Plan 78b-1. La disposition particulière des rideaux et la colombe.


Elle se dirige vers la droite du cadre, ouvre une porte et la referme aussitôt (78 e). Il nous semble que la disposition particulière des rideaux suggère le triple temps : le passé, le présent et le futur. La femme ouvre donc le rideau du présent pour voir jaillir une colombe, qui devient une représentation de son mari, le Poète. La suite de la séquence présente l'arrivée des personnages, comme dans le prologue (plan 1).

Dans l'épisode suivant nous allons rejoindre le Poète dans une église. Mais cette église est inondée. Est-ce un présage de sa future mission ? La piscine de Sainte Catherine. C'est un épisode important, car nous allons assister à un second rêve du Poète, dans lequel il sera question de la plume blanche que nous avons vue au plan 18.


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Liens spécifiques du film

Voir : Nostalghia


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Pledge (The), de Sean Penn

Photogramme – Oiseau 8. The Pledge de Sean Penn. Pour illustrer l’état d’esprit maladif de Jerry, le réalisateur choisit la technique de la surimpression, en ajoutant des oiseaux qui volent. L’effet semble suggérer que Jerry a des « oiseaux dans la tête ».
Photogramme – Oiseau 8. The Pledge de Sean Penn. Pour illustrer l’état d’esprit maladif de Jerry, le réalisateur choisit la technique de la surimpression, en ajoutant des oiseaux qui volent. L’effet semble suggérer que Jerry a des « oiseaux dans la tête ».

Le film commence par sa fin, c’est le moment ou l’esprit de Jerry (Jack Nicholson) bascule dans la folie et l’obsession maladive de retrouver l’assassin des petites filles. Il parle dans le vide, en répétant les mêmes phrases. Pour illustrer cet état d’esprit, le réalisateur choisit la technique de la surimpression, en ajoutant des oiseaux qui volent. L’effet semble suggérer que Jerry a des oiseaux dans la tête, comme si ces idées n’ont plus de cohérence, des idées qui vont dans tous les sens, ou plutôt dans un seul et ultime sens répétitif. (Cf. Photogramme – Oiseau 8.)


On comparant ce plan avec celui des Fraises Sauvages de Bergman, qui présente des similitudes formelles, nous constatons que dans les deux plans, les protagonistes ne vont plus réagir sur le sens de la vie, ils vont se contenter de contempler le défilement du temps. Chez Bergman, Isak va se réfugier dans le passé, au temps des « fraises sauvages », chez Penn, Jerry, répétera inlassablement des phrases incompréhensibles.

*


Une autre image du film The Pledge propose des oiseaux qui volent librement, mais dans un solarium. L’image est remarquable, elle semble signifier l’enfermement psychologique du père[26] de Cathy Olstad, violemment assassinée. Il représente trois oiseaux qui vole librement dans le solarium, ainsi, c’est l’espace entier qui devient une cage. (Cf. Photogramme – Oiseau 9.)

Photogramme – Oiseau 9.The Pledge de Sean Penn. Image remarquable : afin de signifier l’enfermement psychologique du père de Cathy Olstad, violemment assassinée. Penn représente trois oiseaux qui vole librement dans le solarium, ainsi, c’est l’espace entier qui devient une cage.
Photogramme – Oiseau 9. The Pledge de Sean Penn. Image remarquable : afin de signifier l’enfermement psychologique du père de Cathy Olstad, violemment assassinée. Penn représente trois oiseaux qui vole librement dans le solarium, ainsi, c’est l’espace entier qui devient une cage.


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Voir aussi


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Notes et références

  1. Co-scénariste avec Tarkovski du film Nostalghia
  2. - Le médecin : " c'est un cas courant, la mère meurt, soudain la femme, l'enfant, quelques jours et c'est fini."
    - La dame : "Mais il n'a perdu personne."
    - Le médecin : "Il y a aussi le conscience, la mémoire."
    - La dame : " Vous pensez qu'il est coupable de quelque chose."
  3. Pierre Grimal, La Mythologie grecque, P.U.F. (1953) 1986, pp. 6-7.
  4. Pierre Lavedan, Dictionnaire illustrée de la mythologie et les antiquités grecque et Romaines, Paris, 1931, p. 684.
  5. Andreï Tarkovski, Le Temps Scellé, op. cit., p. 100.
  6. Roger Caillois, L'Homme et le sacré, Gallimard, Paris, 1950, p. 23.
  7. Ainsi, Le Miroir devient une lampadégraphie destinée à passer le feu au public, du vœu même de réalisateur : "Le travail de former chez les enfants le sens de la dignité et de l'honneur, un devoir." Cahier Journal 1970-1986, op. cit., p., 18.
  8. C'est ce qui explique l'origine des courses du flambeau hellénique. Cf. Louis Séchan, Le Mythe de Prométhée, pp. 4-6.
  9. Salomon Reinach, Cultes, mythes et religions, pp. 68-69.
  10. Cf. Eschyle, Prométhée enchaîné, vers 488-492.
  11. M.M. Davy, L'oiseau et sa symbolique, p. 12.
  12. Cf. Cicéron, De Divinatio, I, 29.
  13. La Divination, Ouvrage collectif sous la direction de A. Caquot et M. Leibovici, P.U.F. 1968, article de J. Defradas, volume I, p. 69.
  14. (…) "Nous rendons toute sorte de services aux mortels, nous les oiseaux, (…) D'abord c'est nous qui leur signalons les saisons. (…) Nous sommes pour vous Ammon, Delphes, Dodone, Phaibos Apollon. Car vous recourez aux oiseaux dans toutes vos entreprises, commerce, subsistance, mariage, etc. Et vous estimez oiseau tout signe ayant trait à la divination ; une rumeur, pour vous, est un oiseau ; un éternuement, vous l'appelez oiseau ; une rencontre, oiseau ; une voix, oiseau ; un serviteur, oiseau ; un âne, oiseau ! N'est-il pas évident que nous sommes pour vous l'oracle d'Apollon ?" Aristophane, Les oiseaux, traduction H. Van Daele, vers 708-722.
  15. J. Defradas, op. cit., p. 168.
  16. G. Bachelard, Fragments d'une poétique du feu, Editions Gallimard, p. 45. Cf. également, du même auteur, Psychanalyse du feu (1949).
  17. Ibid, p. 50.
  18. Ibid, p. 62.
  19. Les titres des épisodes entre guillemets sont ceux du cinéaste.
  20. Cf. François Ramasse, op. cit., p. 125.
  21. Chevalier/Gherrbrant, Dictionnaire des Symboles, op. cit., p. 695.
  22. Raymond Bloch, La divination dans l'Antiquité, op. cit., p. 10.
  23. Chevalier/Gherrbrant, Dictionnaire des Symboles, op. cit.,p. 695.
  24. Toufic Fahd, La divination arabe, Leiden, 1966, pp. 206-207.
  25. Comme le dira par ailleurs le prêtre, au plan 8 : "Une femme sert à avoir des enfants et à les élever avec patience et sacrifice."
  26. Rôle interprété admirablement par Mickey Rourke


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