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Thèse:Introduction:Approches de la cinémancie

62 octets ajoutés, 14 juillet 2011 à 08:16
Le choix du néologisme, "la cinémancie", est une contraction de cinéma et de mancie.<ref>La mancie est un terme grec, "mantiké", qui signifie, mantique, divination, prophétique. Cf. René Allau, article Divination, Encyclopédie Universalis, p. 575.</ref> C'est un terme qui traduit un effet courant au cinéma, à savoir une connaissance (ou re-connaissance) par l'image, qui prend la forme d'une représentation visuelle ou auditive, et qui présage une "vue" d'un certain avenir (ou d'un passé). Il est fondé sur la représentation et la cristallisation de plusieurs aspects cinématographiques pertinents dans et autour de ce terme.<ref>D'un point de vue linguistique, nous constatons, dans notre langage actuel, la présence du mot "mana" dans les racines de mots tels "émaner" qui dérive du latin "emanare", qui signifie "couler de, sortir de", qui donnera "émanation, manifestation de quelque chose, de quelqu'un". Nous trouvons également le lexème "man" dans "émanciper" qui dérive du latin "emancipere", composé de "ex" qui veut dire "hors de et de mancipium" qui signifie "pris en main, propriété, devenir indépendant".
Par ailleurs, le mot "Mana" est un terme d'origine mélanésienne, repris aux anthropologues qui en ont fait grand usage, à la fin du XIXème siècle, et au début du XXème siècle. Il est en relation dans la terminologie de C. G. Jung avec le concept d'énergie psychique et de libido. Parlant du langage et de l'utilisation du feu, Jung écrit: […] " tous deux sont des produits de l'énergie psychique, de la libido, ou "Mana", pour employer une notion primitive." (C. G. Jung, Dialectique du Moi et de l'Inconscient, en particulier, chapitre IV, La Personnalité "Mana", la citation est une note qui renvoie à Métamorphoses de l'Ame et ses Symboles, (Éditions Gallimard, p. 233.) Il nous semble que symboliquement, le feu peut traduire, la notion d'un "projet de l'objet catalogique" par le fait d'une subite incandescence et d'une transformation téléologique de la matière accompagnée d'une libération d'énergie.</ref> En outre, il résume en partie la conclusion de notre mémoire sur l'objet catalogique. En effet, dans notre étude, "Le Lorgnon de Smirnov", nous avons mis en avant l''''hypothèse du principe de la subite émanation téléologique de l'objet''', comme base interprétative d'une direction de réponse d'un objet catalogique. Comme par exemple le lorgnon de Smirnov dans ''Le Cuirassé Potemkine '' (1925) de S. Eisenstein<ref>Mémoire D.E.A. Strasbourg 1994, op. cit., pp. 8-15.</ref> ; la <u>boue </u> sur Charles Foster Kane dans ''Citizen Kane '' (1941) d'O. Welles<ref>Op. cit., pp. 16-20.</ref> ; la <u>bouteille </u> de vin renversée du Curé d'Audincourt dans ''Le Journal d'un Curé de Campagne '' (1951) de R. Bresson<ref>Op. cit., pp. 21-25.</ref> ; l'<u>arbre </u> qui s'abat sur le frère d'Ivan dans ''Les Chevaux de Feu '' (1987) de S. Paradjanov.<ref>Op. cit., pp. 26-30.</ref> Nous avons constaté qu'un '''objet catalogique''', (comme l'est d'ailleurs un objet cinémantique) : "est en quelque sorte le "signe '''<u>annonciateur</u>'''" d'un climat avant-coureur, à court ou long terme, un "before-shadowing", "une avant-ombre", une espèce d'avertissement, une crainte, une anxiété vague qui traduit l'appréhension du sujet, son inquiétude, son angoisse. Elle vient troubler sa quiétude, ses habitudes. Elle indique "l'état d'esprit du sujet", voire même son état psychomoteur.<ref>Op. cit., p. 35.</ref>"
Ainsi, la réponse d'un objet catalogique réside, comme nous allons le voir, dans sa faculté d'annoncer subrepticement un choix, de prévoir une alternative, souvent visible dans le film. Une telle réponse obéit à ce qu'on pourrait appeler "un effet baromètre".<ref>Car en principe, l'indicateur d'un baromètre indique le temps toujours à posteriori. Ainsi quand on dit que l'aiguille du baromètre monte, cela veut dire qu'il va faire beau dans quelques jours, et non pas à l'instant même où nous lisons le relevé de l'aiguille.</ref> Mais parfois, la réponse est directe, elle est immédiate, elle devient à la fois un jeu de dés et son résultat. Nous le voyons, la question est complexe, car d'une part, nous avons affaire à des objets et des thèmes parfois inédits, qui sont parfois ignorés par la critique cinématographique<ref>Sous cette appellation nous désignons les propositions de Christian Metz qui propose quatre façons d'aborder le cinéma : (…) "La critique de cinéma et l'histoire de cinéma" ; "la théorie du cinéma" (Eisenstein, B. Balázs, A. Bazin) et enfin, "la filmologie" (G. Cohen-Séat, E. Morin, J. Mitry) : "c'est le fait cinématographique plus que le cinéma, le fait filmique plus que le film, qui sont ici envisagés." Christian Metz, Essais sur la signification au cinéma, tome 1, op. cit., p. 92 et 93.</ref> ; d'autre part, la complexité de la question provient de la profusion infinie et multiple des objets dans un film. Or nous pensons qu'il faut éclairer l'ombre caché des objets dans les films, qu'ils ont un rôle important à jouer dans les films et qu'ils offrent également des perspectives épistémologiques. Ainsi, nous serons amenés à traiter la question des rapports et des changements de "l'un dans le tout", ce qui constitue une grande difficulté : comment étudier et traiter "le tout" ? Gilles Deleuze en s'appuyant sur Henri Bergson, précise : (…) "Le tout n'est ni donné ni donnable."<ref>Gilles Deleuze, L'Image-Mouvement, Les Éditions de Minuit, Paris, 1983, pp. 19-22.</ref> Pourquoi ? "Parce qu'il est l'Ouvert, et qu'il lui appartient de changer sans cesse ou de faire surgir quelque chose de nouveau, bref de durer."<ref>Op. cit., p. 20.</ref> Par ailleurs, ce problème a été souvent posé dans la peinture, G. Vasari écrit : (…) " On connaît la proportion que le tout entretient avec les parties, et celles des parties entre elles et avec le tout."<ref>G. Vasari, le vite, I, p. 168-169.Cité par Georges Didi-Huberman, Devant l'image, Les Editions de Minuit, Paris, 1990, p. 96.</ref> Or, nous ne connaissons pas dans le cinéma, dans toute sa véritable dimension, la proportion que le tout entretient avec les parties, et inversement la proportion des parties avec le tout. La question se pose et mérite d'être analysé. Nous partirons du constat : "un film est un tout", dans lequel nous ne pouvons plus rien changer ou modifier. Toutefois la question demeure, de quelles façons appréhender le "tout" ? Et surtout comment ?