Modifications

Aller à : navigation, rechercher

Nostalghia

160 octets ajoutés, 9 décembre 2012 à 17:59
/* Aspects extra-filmiques */
Le film ''Nostalghia'' est le fruit d'une grande maturation de la part de son auteur, dans son ''Cahier Journal'', il écrit : (…) « Un poète russe, Gortchakov, est sur les traces d'un compatriote compositeur qui a séjourné en Italie au XVIIIème siècle, Maxime Beriozovski. <ref>Sisnovski dans le film. </ref> Aidé d'une traductrice, Eugenia, il parcourt le pays, découvre la chapelle où Piero della Francesca a peint la [[Génuflexion|Madone de l'Enfantement]], (…) et une piscine d'eau chaude dédiée à [[Eau|sainte Catherine]]. Gortchakov rencontre là un illuminé, Domenico, qui vit reclus dans sa [[maison]]. Celui-ci cherche à sauver le monde du matérialisme où il se complaît. Avant de s'immoler par le [[feu]], il confie à Gortchakov une dernière tâche : traverser la piscine, vidée de son eau, avec une [[bougie]] à la main. Gortchakov y parvient, mais y perd la vie.» <ref>'''Andreï Tarkovski''', ''Cahier Journal 1970-1986'', ''[[Thèse:Bibliographie#ancre_1|op. cit.]]'', p. 467. </ref>
De plus, Tarkovski collabore avec le scénariste de Michelangelo Antonioni, Tonino Guerra. Ce dernier est marié à une Russe, Lora Iablotchkina. C'est le témoignage d'une affinité pour la Russie. De plus, le projet du film date de plusieurs années (1976), sept ans avant la sortie de la version définitive. <ref> L'auteur effectuera trois séjours en 1977-1978 en Italie, après d'énormes difficultés de la part des autorités politiques. </ref> Nous constatons ainsi qu'Andreï Tarkovski procède par accumulation successive : il a une idée générale, <ref> Pour sa part, le cinéaste américain Billy Wilder écrit : (…) « Quatre-vingts pour cent d'un film tiennent dans son écriture. Les vingt pour cent qui restent vont à l'exécution : mettre la caméra au bon endroit et être capable de se payer des bons acteurs dans tous les rôles.» ( '''Axel Madsen''', ''Billy Wilder'', Cinema one, 1969.) </ref> il la développe au fur et à mesure. Il ajoute d'autres idées qui, au départ n'ont aucun lien entre elles. Le film acquiert de la sorte une épaisseur unique et significative, pour ne pas dire exceptionnelle. <ref>Andreï Tarkovski s'intéressait particulièrement à des «histoires invraisemblables». En voilà une : (…) « Il existe une légende d'après laquelle ici, à Rome, sur la place Saint-Pierre, il y aurait à un certain endroit une porte invisible par laquelle on peut disparaître de ce monde, comme il serait déjà arrivé à beaucoup. Mais trouver ce passage invisible serait extrêmement difficile : il faut pour cela se trouver exactement en face, ou dans une certaine position par rapport à lui… Je ne m'en souviens plus. Mais la légende existe. Norman ( Norman Mozzato : assistant-réalisateur de Nostalghia ) m'a dit qu'il avait fait la proposition d'un scénario sur ce sujet, mais qu'un représentant des hautes sphères catholiques lui avait dit que ce film ne se ferait jamais, parce que le sujet est interdit.» (''C. J.,'' op. cit., p. 308.) </ref> Ainsi, la première allusion au film date de :
<center>* * *</center>
 
==Bilan et perspectives==
D'un point de vue général, notre objectif principal est avant tout de dévoiler les agents et les agissements [[Thèse:Résumé|cinémantiques]] dans un film. C'est en quelque sorte saisir les degrés significatifs d'un objet (type de [[divination]]), dans un plan déterminé. Mais rien n'est plus fugace et éphémère qu'un signe ou un symbole. En effet, il suffit d'un tout petit changement, d'une altération, d'une transformation du signe pour qu'il devienne tout autre. De plus, la complexité de l'analyse d'un film sous un angle [[Thèse:Résumé|cinémantique]] provient d'abord du fait que nous avançons constamment sur un «terrain vierge», qui ne cesse d'offrir des aspects et des faits pertinents, soit de l'ordre d'un objet, soit de l'ordre du cadrage et de la présentation de l'objet.
 
<span id="ancre_33p"></span> [[Fichier:cheveuxp10.jpg|300px|thumb|right|alt=''Nostalghia'', '''Plan 33'''. Les longs cheveux tombants de la Traductrice.| ''Nostalghia'', '''Plan 33'''. Les longs cheveux tombants de la Traductrice.]]
 
Naturellement ces aspects sont «toujours» particuliers, ils ne concernent en général que le film en question. Toutefois, plusieurs aspects particuliers d'un même fait engendrent les prémices d'une découverte, comme par exemple la valeur des cheveux ou du rêve, ou la relation des [[cheveux]] dans le [[rêve]], notamment le [[Cheveux#ancre_33p|plan 33]]. <ref>Les longs [[cheveux]] «en vague» ne sont-ils pas une représentation directe d'un [[rêve]] ? Comme le [[Maison|paysage miniature]] dans la maison du Fou, l'enchevêtrement des cheveux de la Traductrice dessine «une cascade d'attirance», une image vibrante et pleine d'ondulations, des relations entre le couple formé par la Traductrice et le Poète. Le [[Cheveux#ancre_33p|plan 33]] propose aussi «une idée de la distance», même de deux distances. La première «distance» est spatiale, c'est la distance physique qui sépare les deux visages du couple. La seconde «distance» est temporelle : le plan 33 suit le plan 31j, celle du zoom-avant sur une mèche de cheveux blancs du Poète qui suggère une [[plume]]. </ref> De la sorte, nous pensons nous trouver sur des voies épistémologiques.
<span id="ancre_119hp"></span>[[Fichier:manteaup2.jpg|300px|thumb|right|alt='''Photogramme - Manteau 2''' : ''[[Nostalghia]]'', '''Plan 119h'''. Le poète protège la flamme de la bougie avec son manteau. |'''Photogramme - Manteau 2''' : ''[[Nostalghia]]'', '''Plan 119h'''. Le poète protège la flamme de la bougie avec son manteau. ]]
Les quatre personnages du prologue, particulièrement les trois femmes aux châles noirs, ne ressemblent-elles pas ainsi à la Madone del Prato ?<ref> Á une nuance près, les trois femmes ont les bras "fermés".</ref> Comme le dira plus tard le Poète au "Fou" : "ma femme est aussi belle que la Madone del Prato". Cet indice annonce encore plus, car au moment de l'accomplissement du mystère de sainte-Catherine, le Poète accomplira à l'identique le geste de la Madone, en écartant d'abord le côté gauche de son manteau ([[Passage#ancre_119hp|plan 119h]]), ensuite le côté droit (119g). Nous obtenons la figure qui suit, (Cf. Tableau 2. ) et qui met en évidence les équations et les ramifications du manteau du Poète.<ref>Ils méritent d'être signaler : II. Plans 3 et 5 , première apparition du Poète portant un manteau ; II. Plan 18, le Poète ramasse la plume ; III. Plans 19, 22, 24 ("Le hall de l'hôtel"); IV. Plans 28-31j ("La chambre sans fenêtres"); V. Plans 35a, 37b, changement de manteau, nous le verrons sans interruption jusqu'au plan 60 (V et VI) ; VIII. Plans 70, 71, 76, 77, 80b ; IX. Plans 82, 90b, 96 ; X. Plans 98, 102, 119 ; XI. Plan 122, dernier plan du film. </ref>
<br/>
<span id="ancre_10bp"></span> [[Fichier:oiseaup6.jpg|300px|thumb|right|alt=''[[Nostalghia]]'', '''Plan 10b'''. La sortie triomphante des oiseaux des "entrailles" de la Vierge.|''[[Nostalghia]]'', '''Plan 10b'''. La sortie triomphante des oiseaux des "entrailles" de la Vierge.]]
Nous constatons qu'il y a trois moments forts. Le premier c'est l'ouverture symbolique du ventre de la vierge ( Tableau 2 - 3. II. 8 et [[Oiseau#ancre_10bp|plan 10b]]). Le second moment, c'est le changement du manteau ( Tableau 2 - 4 . 2ème manteau : [[Manteau|plan 37]] et [[Manteau#ancre119hp|119h]]). Nous rappelons que dans le plan 37b nous avons suggéré "l'hypothèse du transfert d'identité". Cette hypothèse acquiert à partir de ce qui précède une part de légitimité. Il reste enfin le troisième moment, celui de l'ouverture alternée du manteau ( 5. Plans 119h et g.) A ce compte là, comment interpréter l'objet manteau ? Qu'est-ce qui caractérise ce fait spécifique, celui d'être en relation avec d'autres figures ? Quel est le terme adéquat qui désigne ce fait ? Le manteau du Poète ne devient-il pas un "[[objet]] [[Thèse:Résumé|cinémantique]]" ? N'est-il pas inclus dans une part significative de la destination finale du Poète ? Ne possède-t-il pas des qualités téléologiques ? <ref>C'est dans ce sens que nous avons forgé le néologisme, "l'obmancie" pour l'objet [[Thèse:Résumé|cinémantique]], et "imancie" pour l'image [[Thèse:Résumé|cinémantique]]. Mais pour le moment ces deux termes ont une importance relative, nous ne les utiliserons donc pas. </ref>Mais le manteau est plus encore, car il est associé à la flamme de la bougie, qui nous renvoie de nouveau à la Madone del Prato (plan 14), les plumes qui viennent s'échouer sur des cierges. Une "image-clé" devient une "image passage". N'atteste-t-elle pas inexorablement de l'accomplissement d'un rite, celui du sacrifice du Poète par l'intermédiaire de son "bush soul", "le Fou"? Nous poursuivons notre raisonnement et nous amplifions les relations du manteau, pour obtenir la figure suivante : (Cf. '''Tabelau 3'''.)